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Cette tradition imprime une orientation toute particulière à nos valeurs démocratiques. Ainsi, dans les mots restés célèbres de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, notre première Constitution, le but de notre union politique est « la paix, l'ordre et le bon gouvernement », ce qui tranche avec la vision de Jefferson, axée sur « la vie, la liberté et la recherche du bonheur ». Toutes les traditions politiques, y compris celles de nos voisins du Sud, doivent trouver le juste équilibre entre la liberté, l'ordre, la libre entreprise et l'intervention gouvernementale. Nous y arrivons en nous fondant sur la croyance que la liberté sans l'ordre risque d'engendrer la violence, et que la liberté sans intervention gouvernementale ouvre la porte à l'injustice et à l'inégalité. Ces obligations, d'abord énoncées dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, sont aussi ancrées dans notre Charte des droits et libertés. De profondes raisons historiques expliquent pourquoi nous avons donné tant d'importance à nos principales valeurs politiques. Une population hétérogène, sans mythes communs quant à son origine et dispersée sur un territoire inhospitalier de 5 000 milles, a de bonnes raisons de croire que le ciment de la communauté politique est un gouvernement honnête, attentif, décentralisé et démocratique. Un pays avec un marché interne relativement modeste a appris qu'il ne peut laisser à ce seul marché la création d'une infrastructure commune, et que le gouvernement doit travailler avec les entreprises pour mettre en place les biens collectifs qui font la cohésion d'un pays. Enfin, une nation possédant deux langues officielles et un riche patrimoine de langues autochtones et étrangères sait que son unité tient non pas à des mythes communs quant à son origine ou à des racines ethniques ou religieuses collectives, mais plutôt à ses institutions politiques - Parlement, assemblées législatives provinciales, tribunaux, partis politiques et presse libre - et au credo politique inscrit dans sa Charte.
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